Je vous convie à méditer sur ce texte.
Il était une fois, en un temps qui n’est plus, un pauvre homme cheminant, qui arriva un jour dans un village perdu. Son estomac était vide, et sa bourse aussi, aussi passa-t-il de maison en maison, quémandant un quignon de pain, ou un reste de soupe…Mais dans chaque maison, on lui fermait la porte, lui disant qu’on avait déjà juste pour soi, et qu’on ne pouvait pas nourrir une bouche de plus…
Sans plus récriminer, notre homme s'en alla.
Il se rendit jusqu’à la rivière voisine, et y choisit trois beaux galets, lisses et doux. Puis il ramassa quelques branches de bois mort.
Il revint au village, s’installa sur la grand’ place, et fit un feu.
Il alla remplir un chaudron ventru à la fontaine du village, y plaça les trois galets…et attendit.
Bientôt l’eau se mit à frissonner, et un villageois curieux s’approcha, lui demandant ce qu’il faisait chauffer dans ce grand chaudron.
- de la soupe aux cailloux, bien sûr !
- qu’est-ce que vous me chantez là ?
- comment, vous ne connaissez pas la soupe aux cailloux ? Elle est pourtant très appréciée par chez moi…, si vous voulez, je vous ferai goûter. Bien sûr, d’habitude on y ajoute une ou deux carottes, mais comme ça elle sera très bonne quand même
- J’ai en moi, des carottes, je vais vous en chercher…
Entretemps, deux vieilles du village, après avoir observé le manège derrière leurs rideaux, s’étaient décidées à s’approcher, faisant mine d’aller puiser de l’eau à la fontaine, et n'avaient pas perdu une miette de la conversation.
- Pff, les jeunes n’y connaissent rien…Sans sel, cette soupe sera immangeable…
- Et moi, renchérit l’autre, je te dis qu’il y faudrait un ou deux oignons…
L’homme, sans mot dire, se mit à fouiller dans son baluchon, et soupira…
- Hélas, je n’ai ni l’un ni l’autre…
- Heureusement, nous en avons toujours en réserve…
Et c’est ainsi, que, piqués par la curiosité, tous les habitants arrivèrent un à un, et finirent par apporter qui un navet, qui un poireau, qui une poignée de haricots…Le paysan le plus riche, qui était aussi le maire, apporta même, histoire de ne pas être en reste, un morceau de lard tout droit sorti de son saloir.
Au bout d’une heure, l’odeur de la soupe aux cailloux embaumait tout le village; remontant le long des ruelles, s’insinuant dans les venelles, elle se faufila même jusqu’à la petite église perchée en haut du village, d’où elle parvint à faire sortir le vieux curé .
L’homme invita tous les villageois à partager la soupe. Ils se dépêchèrent d'installer des tables, de chercher des bols et des cuillères. Certains apportèrent du pain et du cidre. Bientôt, tout le monde était assis autour des tables et dégustait un excellent repas, dont la soupe aux cailloux constituait le plat principal.
Et à la fin du repas, alors que chacun digérait doucement, l'un d'entre eux dit : " Nous n'aurons plus faim maintenant que nous savons comment faire de la soupe avec des cailloux."
par cristall @ 2008-01-15 – 00:29:10